L’anniversaire en Slovénie
Le 8 mars, en plus d’être la journée internationale du droit des femmes, est le jour de mon anniversaire. Je la passe entre l’Italie et la Slovénie. Le matin, Francesco m’accompagne pendant les 25 premiers kilomètres, d’abord sous le soleil puis sous une pluie battante. On se réfugie, après avoir passé la frontière sans s’en rendre compte, dans un bar slovène, dégoulinants, transis de froid mais heureux de trouver la chaleur d’un bon café à la turque. Francesco redescend en Italie, je poursuis ma route sous une pluie mêlée de neige vers le petit village perché de Sembiye, où vit Emiliya et sa famille. Dès que j’arrive, Sofija et Olivija, respectivement 10 et 6 ans, se précipitent pour m’offrir une part de gâteau couronné d’une bougie. J’ai le droit à un gâteau d’anniversaire slovène ! On passe la soirée devant un match de foot Real Madrid – Roma, commenté en slovène, à discuter avec Emiliya, qui parle bien l’anglais. Son mari, serbe, ne parle pas beaucoup mais l’accueil est des plus chaleureux. Les parents d’Emiliya sont là aussi, ils viennent de la capitale Ljubljana tous les ans, le 8 mars, pour être aux côtés de leur fille. Je ne resterai que quelques heures en Slovénie. Demain je passe en Croatie.
La côte de Croatie et le vent catabatique
Les vents catabatiques, ce sont bien les vents qui soufflent en Antarctique ? Certes, mais ils sont aussi présents en Croatie. Ah, au temps pour moi. Des vents à vous rendre dingue, soufflant à plus de 60 km/h de moyenne, qui vous balancent hors de la route, vous rendent sourds, vous font passer de 25 km/h à l’arrêt complet en quelques secondes. Je viens de faire connaissance avec la Bora, vent national croate, qui déboule des hauteurs pour se précipiter sur l’Adriatique. Je pensais que la côte dalmate allait être une promenade de santé, c’est sacrément sportif ! Mais sans touristes, sans circulation, la côte se révèle d’une beauté farouche, avec ses falaises de calcaire et ses villes millénaires. Zadar, Trogir, Sibenik, Split… Après Split, je fais une incursion à l’intérieur des terres pour visiter l’arrière-pays, sa campagne, ses rivières, ses canyons, ses massifs montagneux escarpés et sauvages. Lorsque le vent ne souffle pas, la Croatie est un paradis pour cyclobaroudeurs.
Rouler à deux vers Kotor
À peine passées les épaisses murailles de la ville fortifiée de Dubrovnik, un gars m’interpelle « Tu cherches l’auberge ? C’est par là-bas, ça coûte 18€ la nuit et ça a l’air plutôt pas mal ». Le gars s’appelle George. What else ? Cyclo comme quoi, bernois, il descend la côte Adriatique en direction d’Istanbul. Il a aussi connu la puissance du vent croate, la magnifique route au-dessus de la mer, et on va au même endroit. En une minute, on décide de faire la route ensemble le lendemain. Et je prends un lit dans l’auberge, située juste en-dessous des murs de quatre mètres d’épaisseur de la ville. J’avais dit que je ne dépenserai pas un centime pour l’hébergement, première entorse !
Depuis quelques jours, c’est l’effervescence à Dubrovnik. Dark Vador a arpenté les rues pendant deux semaines. Le tournage de l’opus 2 de la nouvelle trilogie de Star Wars vient d’être bouclé, les décors sont encore pour la plupart en place dans la rue principale, qui vient de rouvrir à la circulation piétonne. Les gens qui habitent là ont signé une décharge leur interdisant de dévoiler les scènes filmées ou les noms des acteurs présents. Mais j’ai bien senti une présence, oui, Dark Vador était là. Avant qu’il ne m’annonce qu’il est mon père, on est parti vers le Monténégro, avec George.
George est policier dans la ville de Berne. À 28 ans, il forme les nouvelles recrues au maniement des armes à feu et est membre de l’équipe d’investigation de la ville. Mes cuisses font à peine la taille de ses bras… On quitte Dubrovnik, direction Kotor, au Monténégro. Je n’avais jamais entendu parler de cet endroit. Ou alors je n’avais pas retenu le nom. Parfois je me demande comment des endroits aussi beaux peuvent ne pas être connu de tous. Toute la région est classée au patrimoine mondial de l’Unesco. Il faut dire qu’une muraille de calcaire, haute de plus de 1000 mètres, formant une barrière apparemment infranchissable, sert de toile de fond à la petite ville. Avant d’engloutir un repas monténégrin dans une auberge de la vieille ville, on grimpe au sommet du fort, 400 mètres au-dessus de la ville. Demain, nos routes se séparent. George prend les grands axes, je préfère aller explorer l’arrière-pays et franchir la muraille. Ciao, George.
La haute route du Monténégro
Ça faisait déjà plusieurs jours que j’avais repéré cette route. Un tortillard de 26 lacets, qui grimpe à l’assaut de la muraille au-dessus de Kotor. 1500 mètres de montée sèche, dès le petit-déjeuner. C’est tentant ! Je laisse George sur l’axe principal.Il part en direction de Shkodër, en Albanie, en suivant la côte. La montée débute comme prévue, régulière, rythmée par les épingles à cheveux. Heureusement, vers 8h30 du matin, le soleil ne tape pas encore sur ce versant. En 2 heures, j’atteins 1000 mètres, une vue incroyable sur la baie de Kotor et un resto pas encore ouvert, où je dévore un sandwich de charcuterie monténégrine. La route poursuit son ascension, par une pente bien plus inclinée qu’auparavant, dans le parc national de Lovcén, la montagne noire dont le pays tire son nom. Je suis tellement monté que je rattrape la neige… En trois heures, j’ai changé de saison, passant du printemps à l’hiver. L’arrière-pays est fait de hautes montagnes et de plateaux rocailleux. De l’autre côté de la chaîne de montagne, je découvre une ville, Cetinye, capitale historique du Monténégro jusqu’à son déplacement à Podgorica dans l’entre-deux guerres. Elle arbore encore fièrement, de chaque côté de sa rue principale, les anciennes ambassades de France, du Royaume-Uni. Il flotte comme un parfum de nostalgie, une gloire passée et fanée depuis longtemps. Mais il reste un beau monastère encore en activité. Le soir, je descend par des routes complètement paumées et quelque peu austères jusqu’aux rives du lac de Shkodra. Après 2000 mètres de dénivelées, je dors vers 21h.
La traversée de l’Albanie
J’ai l’impression d’avoir commencé un nouveau voyage. En débarquant dans la ville de Shkodër, en Albanie, je retrouve l’atmosphère des pays d’Orient. La lumière soyeuse, les mosquées et les appels à la prière, la vie foisonnante et les échoppes aux pancartes usées, les carrefours où tout le monde n’en fait qu’à sa tête dans un beau bordel fluide, la poussière, les hommes vêtus de noir et de chapeaux. Tout le monde se retourne sur mon passage. Je détonne forcément, malgré ma tentative de ne pas trop ressembler à un touriste.
Dès le lendemain de mon arrivée, je prends la route des montagnes pour traverser le pays d’ouest en est. La route de Burrel grimpe au fond d’un canyon où serpente une rivière verte. S’ouvre dans une large vallée, retrouve un autre canyon, grimpe à nouveau. On a l’impression de monter un escalier géant. Je passe la nuit dans une famille albanaise qui m’accueille, quelques kilomètres avant le village de montagne de Burrel. Ils vivent dans une maison posée au milieu d’un champ. Très pauvres, ils hèlent les cyclobaroudeurs et les accueillent contre quelques leks, la monnaie locale. Je profite de l’occasion pour découvrir la cuisine albanaise du coin. Poisson grillé, viande de bœuf, patates frites dans le beurre, soupe de fèves, fromage frais, œufs au plat, pain, raki. Tout, à part le poisson et le raki, vient de leur ferme. Les vaches, les poules et les moutons produisent la plupart du repas. Le pain sort tout juste du poêle. Un cyclo, en fin de journée, a faim. Très faim. Mes papilles étaient surexcitées rien qu’à la vue de l’assiette fumante que Xhevrije pose devant moi. J’ai pris sur moi pour prendre la photo avant de dévorer son contenu.
Après le village de Burrel, la route poursuit sa lente ascension vers le col de Bualli, à 842 mètres d’altitude. Toutes les voitures, sans exception, me saluent d’un furtif coup de klaxon et me lancent des encouragements. Les taxis-bus sont nombreux à sillonner les routes albanaises. Ils forment le plus gros de la circulation. Mais on ne peut pas dire qu’il y ait foule sur la route. Dans les champs, comme au Monténégro, l’activité bat son plein, les gens sont dehors et travaillent la terre.
Après le col, je rencontre, à Bulqize, l’imam de l’une des mosquées. Il me raconte comment la ville s’est développée dans les années 1950 lors de l’ouverture de la mine de chrome, dont on voit les terrils noirs sur la pente opposée. La mine emploie près de 800 personnes, sur les 16000 habitants. Malgré la richesse des sous-sols, la région reste pourtant toujours très pauvre, comme me l’explique Lulzim, un jeune père de famille qui compte sur l’essor touristique de sa vallée pour arrêter de travailler à la mine et ouvrir des activités de pleine nature. La région est superbe. Reculée, sauvage, mais elle mérite la grimpette jusqu’ici.
Deux jours en Macédoine
Il est arrivé trempé, transi et la faim au ventre. J’en étais à mon deuxième raki. Il était 10 heures du matin. George a repéré mon vélo, posé contre la maison de bois qui sert de refuge aux travailleurs routiers. Au sommet du petit col au-dessus d’Ohrid, sur la route de Bitola, je m’étais arrêté dans cette petite cahute, trempé par la pluie froide. Il faut quelques secondes pour que les yeux s’habituent à la pénombre qui règne à l’intérieur. Trois gaillards fument des cigarettes autour d’une table tandis qu’un poêle ronflant tente de repousser les courants d’air. Aux murs, des posters de femmes dénudées et des réclames pour la toute dernière Renault Espace de 1994. Un calendrier religieux, aussi. Je pose mes affaires autour de la source de chaleur et les écoute parler à voix forte. Parfois, ils s’interrompent pour me poser quelques questions dans un mauvais anglais avant de repartir dans leur conversation. On me sert du raki, du café turc, je me réchauffe un peu. George reproduit la même scène une heure plus tard. On ne s’était pas donné rendez-vous, on s’était quitté avant le tunnel à la sortie de Kotor, dans le pays précédent. Il faut se forcer un peu pour s’extraire de la douce chaleur du poêle et affronter la descente à 60 à l’heure vers la prochaine plaine. Au sommet du col suivant, on retrouve une cahute similaire, où Alex nous sert du café. On passe ainsi la journée, passant d’une bulle de chaleur à l’autre, accueillis par les sourires des ouvriers de la route.
La traversée de la Macédoine se fait dans la grisaille. On ressort les habits d’hiver. Hier soir, à Ohrid, je cherche un endroit où poser le bivouac. Dans une station service, je demande au pompiste un carré de pelouse. Il m’indique la propriété juste derrière, qui appartient à son oncle, directeur d’une entreprise agricole. Il m’offre le couchage dans une pièce de 4 mètres sur 4 au sol de béton, meublée de 2 tables, quelques chaises et d’un poêle à bois. Je passe la soirée avec le gardien, qu’on dirait tout droit sorti d’un roman de Tolkien, catégorie « nain de la Moria ». Un gars tout content de m’accueillir et qui me regarde avec attention déballer le contenu de mes sacoches, installer la tente sur la dalle de béton. On boit le café ensemble, on échange quelques phrases, difficilement. Le lendemain matin, la pièce se remplit des ouvriers venus travailler dans les linéaires de serres en plastique où poussent des végétaux non-identifiés.
L’arrivée à Bitola se fait sous une pluie battante, sur une route fermée pour travaux. Les chaussures se transforment en piscine, on prend une chambre dans une auberge de jeunesse du centre-ville. En partant le lendemain, le thermomètre affiche 0°C il se met à neigeoter. Fera-t-il meilleur en Grèce ? On le saura dans une heure.
25-31 mars, Grèce
Aaah, la Grèce… ses plages, son soleil, sa chaleur ! Hum… pas du tout.
La neige est descendue des sommets pendant la nuit et s’est invitée jusqu’en ville. Les hauteurs sont blanches et il fait un froid glacial. Avec George, on franchit la frontière Macédoine – Grèce dès 9h du matin, avant de traverser une plaine un peu triste. Pendant toute la journée, on fuit les nuages de neige qui nous poursuivent du nord-ouest avant d’arriver à Edessa dans une belle lumière de fin d’après-midi.
Edessa
Edessa, c’est un peu la Venise grecque. Une ville d’eau, posée en bordure d’un plateau surplombant une large plaine, ouverte vers Thessalonique et les rives de la mer Égée. Les canaux sillonnent la ville avant de se rejoindre en une chute d’eau stylisée. Les abords, transformés en parc urbain, ont été soigneusement aménagés pour accueillir les visiteurs. Ça fait un peu toc, mais la ville est jolie et semble très accueillante. Les commerces sont nombreux, les jardins publics sont propres et verdoyants. Sauf qu’aujourd’hui, 25 mars, c’est fête nationale. On aurait dû s’en douter, avec tous ces drapeaux déployés. En 1821, les grecs ont pris leur indépendance de l’Empire Ottoman. C’est super pour eux, moins pour nous. Pas un commerce n’est ouvert. George débusque tout de même un kiosque où acheter deux-trois bières, qu’on sirote dans notre bivouac idéal, posé au milieu d’un champ de prunier en fleur, en dessous de la ville.
Le lancement de la saison touristique
Le mois de mars, en Grèce, marque le début de la saison touristique. Ou plutôt sa préparation. Entre Thessalonique et la frontière turque, le front de mer ressemble à un chantier dans les petites localités de trait de côte. La rue la plus passante, la littorale, a souvent été construite si proche de l’eau qu’elle a été grignotée par les vagues des tempêtes d’hiver. Il faut stabiliser la chaussée, refaire le bitume. Les restaurants retapent les terrasses en tek, raccrochent les enseignes lumineuses, passent le mobilier au karcher. Les plages, désertées pendant 6 mois, n’ont pas l’aspect « carte postale » qu’on leur connaît d’habitude. Jonchées de plastique, de capsules de bouteilles, de mégots de cigarettes, elles font grise mine en attendant d’être, elles aussi, ratissées, lavées, lissées. On a l’impression de voir les coulisses d’un spectacle, juste avant l’entrée en scène. Tout ce remue-ménage est observé par l’œil fatigué des gros chiens qui dorment en meute le long des routes.
La route avec les suisses et le bivouac footballistique
Pendant deux jours, je roule avec un couple suisse, Katya et Philip. George est resté à Thessalonique, son dérailleur arrière s’est brisé et il doit réparer. Comme George, Katya et Philip viennent de Bern. Ils vont à Bangkok, en passant eux aussi par Istanbul, alors on fait route ensemble, sous le soleil retrouvé. Un soir, on trouve un magnifique terrain de foot où poser nos tentes. Un ancien wagon sert de salon, avec des canapés profonds et des petites tables. On s’y installe, une bière à la main, en regardant la lumière du soir décliner. En mettant en commun nos victuailles et nos réchauds, on se prépare un véritable festin d’aubergines, poivrons, pâtes, tandis que les joggeurs du soir font 20 fois le tour du stade. Nous, c’est bon, on a roulé toute la journée, on se repose en regardant les autres courir et transpirer.
Les camps de réfugiés
Ni à la frontière de Macédoine, ni dans la campagne grecque, nous n’avions décelé la présence des migrants, fuyant la Syrie par voie maritime. Mais en se rapprochant de la Turquie, les installations de fortune font leur apparition, souvent bien dissimulées du regard des passants ou des voies de communication. Des camps de toiles, régis par l’armée grecque, pas très grands. On les repère à l’afflux de personnes marchant le long des routes, en direction des centre-villes. Pour trouver du travail ? Acheter de la nourriture ? Chercher de l’eau ? Je ne sais pas et je trouvai indécent de m’arrêter pour le leur demander, alors que je fais route en sens inverse vers les régions qu’ils fuient.
L’entrée en Turquie et les trois amis du camping de Marmara Ereglisi
Lorsqu’on entre sur le territoire turc, on ne peut pas le confondre avec les Pays-Bas, même si, au premier abord, le paysage est aussi plat que là-bas. Rien, absolument rien, n’est adapté au déplacement à vélo. Dès le franchissement de la rivière Maritsa, qui fait office de barrière naturelle entre les deux pays, c’est sur une autoroute que les kilomètres se mettent à défiler. Une journée comme pas d’autres, avec vent dans le dos et lignes droites à n’en plus finir. Une journée où, dès le début, s’installe l’idée de rompre la monotonie en se lançant un de ces défis un peu débile : battre son record de kilomètres en une journée, avec un vélo chargé de 30 kilos de matériel. Le dernier en date, c’était en débarquant à la Rochelle chez mon ami Quentin, après 145 kilomètres de chevauchée depuis Angoulême, lors d’un reportage pour le magazine 200. C’est parti.
C’est vrai, par deux fois, je me suis accroché aux véhicules les plus lents pour monter des côtes. 3 kilomètres, en tout. Une fois, c’était un camion bâché, l’autre, la remorque puante d’un tracteur. Je gravissais les côtes à la vitesse fulgurante de 22 km/h. Il y a un côté grisant, et particulièrement dangereux si l’on y réfléchit une seconde, à faire du stop de cette façon. Mais à vélo sur une autoroute, on a tellement l’impression d’être un extraterrestre qu’on fait des choses bizarres. Personne, pourtant, n’y a trouvé à redire. Je me faisais même encourager par les klaxons. À partir du moment où les charrettes tirées par des ânes prennent elles aussi les grands axes, et à contre-sens, ce n’est pas un deux-roues non motorisé sur la bande d’arrêt d’urgence qui va détonner dans le paysage.
J’ai passé la journée de stations essences en stations essences, à remplir ma gourde d’eau, vider des paquets de biscuits et avaler les kilomètres.
Au bout du 152ème kilomètre, j’étais fatigué, quand même. Mon record était battu et je m’en fichais. « Pourquoi ai-je fait ça, déjà ? » Le soir commençait à descendre, et il fallait trouver un campement, dare-dare. Dans les faubourgs de Marmara Ereglisi, on m’indique un camping. Je pousse le portillon d’un carré de terre bordé au nord par la voie rapide, au sud par la mer de Marmara et les deux autres côtés par des habitations pavillonnaires. L’endroit ressemble à tout sauf à un camping pour touristes. Des constructions mal terminées, en bois, bâches et cordages forment un petit village d’une trentaine d’habitations.
Et là, attablés autour d’une petite table, sous un arbre en fleur, trois personnes me voient débarquer, les traits tirés par l’effort de la journée. Deux anciens flics et un imam, copains d’enfance, venus d’Istanbul trouver le calme et la tranquillité. En cinq minutes, je me retrouve assis à table avec eux, à boire du raki, face à une assiette fumante de pâtes et de sauces au kefir et aux herbes. Jamal, l’imam, surnommé le « chef » par ses deux amis, Jarol et Muamber a tout préparé dans sa petite cuisine fabriquée de bric et de broc. J’arrive pile à l’heure du dîner. Mon intégration au groupe se fait de manière tellement naturelle que j’ai l’impression qu’ils m’attendaient pour se mettre à table. L’hospitalité turque, ou « l’hôte de Dieu », comme ils disent : on doit recevoir l’étranger comme si c’était un cadeau de Dieu. Je n’en demandais pas tant, mais les pâtes étaient excellentes ! Quelques heures plus tard, on dort tous dans la même pièce, remplies de tapis et d’un poêle ronflant. J’ai tenu une heure. Ensuite je suis allé installer ma tente à l’extérieur, tellement la température grimpait. Dormir à plus de 30 degrés, impossible !
Demain, Istanbul ?
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